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PANDÉMIE – Les locataires peuvent être exemptés de payer leur loyer pour cause de force majeure durant la période de confinement

Juil. 2020
  • Publications
  • Droit des affaires

La question est sur les lèvres de bien des bailleurs et des locataires. Est-ce que les commerces qui ont été forcés de fermer durant le confinement doivent payer leur loyer même s'ils ont été empêchés d'opérer? Les décisions sur la question sont rares.

 

Or, le 16 juillet 2020, la Cour supérieure du Québec rendait justement une décision sous la plume du juge Peter Kalichman qualifiant la pandémie de force majeure dans le cadre de l'application d'un bail commercial et de l'étude d'une réclamation de loyer pour les mois couverts par le décret d'urgence sanitaire et le confinement (Hengyun International Investment Commerce Inc. c. 9368-7614 Québec inc., 2020 QCCS 2251 (CanLII)).

 

Le tribunal conclut en effet que le bailleur ne peut pas réclamer son loyer pour les mois couverts par le décret au cours desquels son locataire était empêché d'opérer son commerce, en l'occurrence, un centre de conditionnement physique.  Selon le tribunal, le bailleur a été empêché d'exécuter son obligation principale de procurer la jouissance des lieux loués par le décret. Le juge ajoute que le décret constitue aussi un trouble de droit au sens 1858 C.c.Q., contre lequel le bailleur est tenu de garantir son locataire. Par conséquent, le locataire est libéré de son obligation corrélative de payer le loyer pour la période visée par le décret.

 

Fait remarquable, le tribunal arrive à cette conclusion même si le bail contenait une clause de force majeure prévoyant que le locataire doit continuer de payer son loyer en cas de force majeure. Le juge met la clause de côté sur la base d'un argument de texte. Puisque, selon lui, la clause visait les obligations qui sont retardées par la force majeure plutôt que celles qui sont empêchées par la force majeure, elle n'est pas applicable.  Le tribunal rappelle qu'il est établi par la doctrine et la jurisprudence de la Cour d'appel que si les parties peuvent limiter les obligations du bailleur quant à son obligation de procurer la jouissance paisible des lieux à son locataire, il ne peut pas l'exclure totalement.

 

Cette décision sera certainement invoquée par les locataires pour refuser d'acquitter les loyers en retard qui peuvent s'être accumulés au cours des derniers mois. Les bailleurs pourront toutefois chercher à faire les distinctions nécessaires pour faire valoir que la décision n'est pas applicable à leur bail. Le délai d'appel n'est pas expiré, il n'est pas impossible que la décision soit portée en appel.

 

N'hésitez pas à communiquer avec un membre de l'équipe de droit des affaires pour discuter de la question en lien avec vos droits et obligations concernant votre bail commercial. Nos experts peuvent vous guider en cette matière.