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Nouvelles dispositions législatives en matière d’assurance des copropriétés divises

Jan. 2019
  • Publications

Le 13 juin 2018, l'Assemblée nationale du Québec a adopté et sanctionné la Loi visant principalement à améliorer l'encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d'argent et le régime de fonctionnement des institutions financières (projet de loi 141).

 

Cette loi introduit notamment des changements importants dans le domaine de l'assurance des copropriétés divises, lesquels sont entrés en vigueur le 13 décembre 2018. Les nouvelles dispositions sont insérées au Code civil du Québec, et sont les suivantes :

 

1074.1. Lorsque survient un sinistre mettant en jeu la garantie prévue par un contrat d'assurance de biens souscrit par le syndicat et que celui-ci décide de ne pas se prévaloir de cette assurance, il doit avec diligence voir à la réparation des dommages causés aux biens assurés.

Le syndicat qui ne se prévaut pas d'une assurance ne peut poursuivre les personnes suivantes pour les dommages pour lesquels, autrement, il aurait été indemnisé par cette assurance :

  1. Un copropriétaire;
  2. Une personne qui fait partie de la maison d'un copropriétaire;
  3. Une personne à l'égard de laquelle le syndicat est tenu de souscrire une assurance en couvrant la responsabilité.

 

1074.2. Les sommes engagées par le syndicat pour le paiement des franchises et la réparation du préjudice occasionné aux biens dans lesquels celui-ci a un intérêt assurable ne peuvent être recouvrées des copropriétaires autrement que par leur contribution aux charges communes, sous réserve des dommages-intérêts qu'il peut obtenir du copropriétaire tenu de réparer le préjudice causé par sa faute.

Est réputée non écrite toute stipulation qui déroge aux dispositions du premier alinéa.

 

1074.3. Lorsque des assurances contre les mêmes risques et couvrant les mêmes biens ont été souscrites séparément par le syndicat et un copropriétaire, celles souscrites par le syndicat constituent des assurances en première ligne.

 

1075.1. Un assureur ne peut, malgré l'article 2474, être subrogé dans les droits de l'une des personnes suivantes à l'encontre d'une autre de celles-ci :

  1. Le syndicat;
  2. Un copropriétaire;
  3. Une personne qui fait partie de la maison d'un copropriétaire;
  4. Une personne à l'égard de laquelle le syndicat est tenu de souscrire une assurance en couvrant la responsabilité.

 

Il est fait exception à cette règle lorsqu'il s'agit d'un préjudice corporel ou moral ou que le préjudice est dû à une faute intentionnelle ou à une faute lourde.

 

D'abord, l'article 1074.1 du Code semble permettre au syndicat de ne pas se prévaloir de la garantie d'assurance prévue à sa police. Il doit toutefois voir rapidement à la réparation des dommages causés par le sinistre puisque la mission d'un syndicat est la conservation de l'immeuble et qu'il a également l'obligation de mitiger ses dommages. Malgré cette option pour le syndicat de ne pas se prévaloir de l'assurance, nous croyons qu'il doit tout de même déclarer le sinistre à son assureur afin de conserver ses protections.

 

L'article 1074.2 du Code semble cependant conférer au syndicat le droit de poursuivre un copropriétaire pour les dommages-intérêts causés par sa faute, ce qui est pourtant interdit en vertu de l'article 1074.1, al. 2 du Code. L'article 1074.2 du Code semble même en contradiction avec lui-même, alors qu'il prévoit que le syndicat ne pourra recouvrer des copropriétaires fautifs les sommes engagées pour le paiement des franchises et la réparation du préjudice aux biens, sinon par la contribution aux charges communes par l'ensemble des copropriétaires.

 

Une contradiction existe donc entre les articles 1074.1. et 1074.2 du Code, et il faudra patienter afin de voir de quelle façon les tribunaux interpréteront l'application de ces articles et sous quelles conditions le recours du syndicat contre le copropriétaire fautif sera possible.

 

Enfin, l'article 1075.1 du Code vient restreindre le recours subrogatoire tant de l'assureur d'un copropriétaire que de l'assureur du syndicat contre le tiers fautif. Ainsi, malgré le principe créé à l'article 2474 du Code, les recours subrogatoires d'un assureur en matière de copropriété divise seront prohibés à l'égard du syndicat de copropriété, d'un copropriétaire, d'une personne faisant partie de la maison d'un copropriétaire et d'une personne à l'égard de laquelle le syndicat est tenu de souscrire une assurance en couvrant la responsabilité.

 

Le recours subrogatoire sera toutefois possible contre le tiers fautif, même si ce dernier est l'une des personnes prévues ci-dessus, en cas de préjudice corporel ou moral, ainsi qu'en cas de faute intentionnelle ou faute lourde.

 

Évidemment, ces changements législatifs auront un impact important sur les assureurs de copropriétés divises. Il est à prévoir que les primes d'assurance augmenteront en raison de ces changements puisque les droits des assureurs de récupérer les sommes versées en indemnités à leur assuré viennent d'être largement diminués.

 

Il sera également intéressant de voir de quelle façon ces nouveaux articles de loi seront interprétés par les tribunaux dans l'avenir.